Les enfants de la terreur – Articles de presse

Le Monde / Brigitte Salino / "Le terrorisme à l'épreuve de la scène" / 11.11.2014

Le terrorisme à l'épreuve de la scène

Judith Depaule n’est pas une inconnue dans la saison. Après avoir étudié le russe et fait une thèse sur le théâtre dans les camps staliniens, elle a créé un spectacle inspiré par ses recherches : Qui ne travaille pas ne mange pas (en 2004). Puis elle a travaillé sur la question du genre, en s’intéressant aux femmes dans le sport. Il en est né une trilogie théâtrale, Corps de femmes (2008-2011).

Aujourd’hui, Judith Depaule passe à un autre sujet,sans quitter le registre politique engagé qui la caractérise : le terrorisme des années 1970. Son
spectacle s’appelle Les Enfants de la terreur, et il est
présenté dans le cadre du festival Mettre en scène,
organisé par le Théâtre national de Bretagne, qui offre chaque année, en novembre, des découvertes et des retrouvailles. Judith Depaule y trouve naturellement sa place, parce qu’elle est à part, en tout cas hors des modes. Elle fait ce qu’elle juge bon de faire, et il semble que rien ne puisse l’en détourner.

La voilà donc sur la trace des années 1970, qu’elle est trop jeune pour avoir activement vécues : née en 1968, elle était enfant quand, en Allemagne, avec la Fraction armée rouge, en Italie, avec les Brigades rouges, et au Japon, avec l’Armée rouge japonaise, des mouvements révolutionnaires ont décidé de passer à la lutte armée. On sait ce qu’il en advint : des attentats, des enlèvements, des meurtres. Une violence extrême, en réponse à une violence jugée extrême par les terroristes, issus d’une génération marquée par la seconde guerre mondiale, insurgés contre des Etats considérés comme policiers, révoltés par les guerres provoquées par l’impérialisme, et farouchement liés à la cause palestinienne.

Le spectacle de Judith Depaule s’organise autour de six figures marquantes : Fusako Shigenobu et Kozo Okamoto pour le Japon, Andreas Baader et Ulrike Meinhof pour l’Allemagne, Margherita Cagol et Renato Curcio pour l’Italie. A côté de ces leaders, il y a une enfant, May Shigenobu, la fille que Fusako a eue au Liban, et qui a grandi dans la clandestinité, allant d’un pays à l’autre, parlant à sa mère une fois par mois, au téléphone. Aujourd’hui, elle a 41 ans, et elle est journaliste au Japon, où sa mère, condamnée à vingt ans de réclusion, après son arrestation en 2000, purge sa peine dans une prison des environs de Tokyo. Kozo Okamoto, le camarade de Fusako Shigenobu, est resté au Liban.

Le troisième survivant, Renato Curcio, qui a été définitivement libéré en 1998, après vingt-deux ans de détention, a fondé une coopérative en Italie. Sans rien renier de son passé. Sa femme, Margherita Cagol, a été tuée en 1975, lors d’une prise d’otages. Andreas Baader et Ulrike Meinhof sont morts en prison, en 1976 et 1977. Officiellement, ils se sont suicidés.

Jeu vidéo

Pour raconter ces histoires qui appartiennent à l’Histoire, Judith Depaule s’est sérieusement documentée, comme en témoigne son spectacle, qui est ce que l’on peut appeler du théâtre  » patent  » : mouvements expressifs, scènes nettes, mots clairs. Tout se passe dans un dispositif simple : une scène vide, de grandes caisses sur le côté, un écran au fond. Quelques détails vestimentaires donnent le ton de l’époque et des nationalités. Les comédiens ne cherchent pas à incarner les  » enfants de la terreur  » : ils les reproduisent, comme des types, en se tenant à une distance qui les rapprochent de marionnettes ou de personnages de jeux vidéo. C’est d’ailleurs sous cette forme que l’on voit certains attentats, reproduits sur une maquette, qui est filmée en direct. Sinon, les images empruntent aux archives, à un faux journal télévisé ou à un brouillage étudié.

Six acteurs, une acrobate et deux musiciens entrent dans le jeu de Judith Depaule, qui suit un fil chronologique clair. A cela, il n’y a rien à redire : on comprend ce qui se passe. Mais ce qu’on en retient, c’est une autre histoire. Dans sa déclaration d’intention, l’auteure et metteuse en scène écrit que  » ces hommes et ces femmes (…), par leur radicalité, cautionnèrent l’irréparable. Produisant l’inverse de ce qu’ils prônaient « . Judith Depaule colle tellement à son sujet qu’elle en vient quasiment à produire l’inverse de ce qu’elle écrit : un attrait pour la violence du terrorisme, dont la mécanique est énoncée, mais les victimes, écartées. Ainsi peut-on, avec les meilleures intentions, s’engouffrer dans un piège. De ce point de vue, Les Enfants de la terreur sont intéressants : ils témoignent de la difficulté à aborder l’Histoire au théâtre.

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L’Anticapitaliste / Kevin Rennes / "Les enfants de la terreur" / 06.11.2014

Les enfants de la terreur

Spectacle multimédia de Judith Depaule
Celles et ceux qui, dans le sillage de 1968, choisirent la lutte armée au sein de la Fraction armée rouge (RAF), des Brigades rouges et de l’Armée rouge japonaise… Un spectacle sur l’histoire de six militants, avec focus sur l’année 72, année du passage à l’acte pour ces trois organisations et de la prise d’otage aux JO de Munich.

Ces enfants, qui nous racontent leurs désirs, leurs rapport à la mort, leur vision de la révolution, et qui voulait à juste titre combattre l’impérialisme américain au Vietnam ou encore soutenir le peuple palestinien, sombrèrent peu à peu dans un terrorisme aveugle et surtout se coupèrent de plus en plus des travailleurs. Même dans leur langage, dans leurs mots (le texte reprend et retravaille remarquablement la parole de ces militants), la césure est flagrante.
Les années 60/70 sont aussi celles de la révolution des corps (Marcuse), et la chorégraphie de ce spectacle tend à rendre hommage à cette libération corporelle des carcans bourgeois. La violence de l’incarcération et de la répression policière y est jouée justement et est scénographiquement très forte. La musique est aussi une plongée dans l’univers Krautrock qui apparaît alors en Allemagne et tente de bousculer le rock traditionnel.

Une résonance actuelle
Par sa beauté et les émotions qu’il procure, ce spectacle (musique, danse, vidéo, modélisme et même jeu vidéo) nous transmet le caractère romantique de l’engagement de ces militants révolutionnaires sans révolutions. Cette imagerie romantique, aussi belle soit-elle, aussi remarquablement proposée ici, ne doit pas nous faire oublier que la révolution ne se fera pas au nom des travailleurs, qu’elle sera l’œuvre des travailleurs eux-même.
Ce spectacle trouve par ailleurs une résonance actuelle dans cette période de répression policière, d’agressions militaires impérialistes, de colonisation et d’occupation en Palestine, qui nous rappellent tous les jours que le combat pour l’émancipation de la classe ouvrière n’est pas terminé.

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Les Inrockuptibles / Hugues Letanneur / "A Rennes, un festival de fulgurances" / 12.11.2014

A Rennes, un festival de fulgurances

Premiers temps forts de cette nouvelle édition de Mettre en scène avec trois créations particulièrement réussies signées Lazare, Judith Depaule et Chloé Moglia.

La pensée s’envole. Les images se bousculent. Un curieux principe de distraction régit les événements. Comme une dérive en chute libre irradiée de fulgurances, Petits contes d’amour et d’obscurité, dernière création de Lazare présente la texture d’un puzzle dont les éléments en désordre animent un foisonnement luxuriant. Constitué de deux pièces, Les Illisibles et Quelqu’un est Marie, ce spectacle brasse un matériau composite truffé de références – au surréalisme, au cinéma (muet et parlant), au théâtre de Feydeau, à l’enfance – où domine l’impulsion du sentiment amoureux.

Du militantisme à la lutte armée

Présenté à Rennes avant de partir en tournée, ce spectacle est un des temps forts du festival Mettre en Scènes où l’on a pu aussi découvrir Les Enfants de la terreur, création très réussie de Judith Depaule qui revient sur les actions de plusieurs mouvements terroristes à l’aube des années 1970. Qu’il s’agisse de la Fraction armée rouge (RAF) en Allemagne, des Brigades rouges en Italie ou de l’Armée rouge au Japon, la question posée est : comment et pourquoi passe-t-on du militantisme à la lutte armée ? Le spectacle se concentre sur l’année 1972 avec notamment la prise d’otage aux Jeux olympiques de Munich qui se soldera par la mort de onze membres de l’équipe olympique israélienne.

La cohabitation sur le plateau d’acteurs et de musiciens combinée avec une création vidéo, permet d’échapper à l’aspect documentaire et met le spectateur de plain pied avec les protagonistes, dont on partage en quelque sorte l’existence. La musique en particulier donne à cette évocation d’une révolte habitée par des utopies qui aujourd’hui n’ont plus cours une impulsion d’ordre quasi physique. Cela n’est pas le moindre mérite d’un spectacle finement écrit et dirigé.

En apesanteur

D’un tout ordre mais aussi très réussi, Aléas #2 de Chloé Moglia se joue avec beaucoup d’élégance des lois de la pesanteur. A commencer par cette acrobate qui évolue au-dessus du public sur une rampe avec des figures légères pleines de grâce comme si elle flottait en apesanteur. Une fois au sol, elle explique sans le moindre essoufflement quelques notions de physique avant d’être rejointe par des partenaires qui éclairent et mettent en pratique ses propos. Du grand art, précis, subtil, intelligent et géré, là encore, avec beaucoup de finesse.

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Rue 89/Théâtre et Balagan / Jean-Pierre Thibaudat / "« La mission », « Les enfants de la terreur » : c’était comment les mouvements révolutionnaires ?" / 13.11.2014

« La mission », « Les enfants de la terreur » : c’était comment les mouvements révolutionnaires ?

L’allemand Michael Thalheimer et la française Judith Depaule devraient se rencontrer. Non pour commémorer encore la Grande guerre (on est rassasié) mais pour «  échanger  » (comme disent les communicants) autour des aléas qui accompagnent tout mouvement révolutionnaire et dont parlent les spectacles qu’ils mettent en scène :

lui, «  La mission  » (pièce sous-titrée «  souvenir d’une révolution  ») de Heiner Müller ;
elle, «  Les enfants de la terreur  » d’après les écrits, dires et actions de mouvements révolutionnaires des années 70 en Allemagne (Fraction Armée Rouge), Italie (Brigades Rouges) et Japon (Armée Rouge Japonaise).
Organisons le dialogue de leurs propos (authentiques) :

 

« Changer le monde, mais à quel prix ? »

Lui : « Ce qui me paraît certain, c’est que dans notre réalité sociale, nous avons échoué face à toute pensée révolutionnaire, et qu’il faudrait que nous nous posions la question, que nous mettions à l’épreuve ce que signifie ou a pu signifier pour nous la révolution. »

Elle : « Née trop tard pour avoir vécu cette période [elle fait référence à la fin des années 60-début des années 70 qui a vu l’émergence des mouvements rouges, ndlr] mais trop tôt pour m’en défaire, j’héberge à mon corps défendant, l’héritage d’une utopie qui oscille entre fascination et rejet et me pose la question critique de mon propre engagement. Changer le monde, le rendre meilleur, faire justice, mais comment, à quel prix  ? »

Lui : « J’ai l’impression qu’il y a quelque chose qui ne va pas vraiment dans le monde et dans cette société, en même temps, j’ai atteint un âge [il est né en 1965] où je n’ai plus envie de monter sur les barricades pour sacrifier tout mon être afin que quelque chose change. La question de savoir pourquoi je ne le ferais pas me fait mal. »

Elle : « Je cherche à mettre en perspective un présent embarrassé et difficile afin d’envisager l’avenir. »

Elle et lui signent des mises en scène qui reflètent leurs propos.

Michael Thalheimer, un peu désabusé et pas fier de l’être, se fond dans le personnage de Debuisson (interprété avec une force extraordinaire par Charlie Nelson, un acteur qui se bonifie en vieillissant), pivot de son spectacle plus qu’il ne l’est de la pièce de Müller.

Debuisson nous apparaît comme une épave alcoolique, un vieil acteur mal démaquillé en quête de rôle, un beau parleur sur le retour, mais tout de même il y a cru et l’acteur le rend attachant. Des trois hommes envoyés par la Convention délivrer la Jamaïque de l’esclavage, il est le seul survivant. Avant de mourir, le paysan Galloudec (Claude Duparfait) lui écrit son sur son lit d’agonie une dernière lettre et l’informe que leur troisième compagnon, Sasportas (Jean-Baptiste Anoumon), a été pendu. Debuisson reste seul avec ces ombres du passé qui ressurgissent grimées, ensanglantées, accompagnées d’une guest star  : «  l’ange du désespoir  » (Noémie Develay-Ressiguier).

« Tuez-moi avant que je vous trahisse »

La pièce de Müller avance à la vitesse des rêves et des cauchemars, coagule les époques. La mission est caduque, l’époque a changé. A Paris en 1802, Napoléon a redonné force de loi à l’esclavage et à la traite des noirs proscrits par la Convention en 1794. Debuisson rêve qu’il marche dans New York. Entre un homme qui prend un ascenseur, ajuste sa cravate pour aller voir ses supérieurs, l’ascenseur sans fin monte jusqu’au Pérou (dans son autobiographie «  Guerre sans bataille  » publiée à l’Arche, Müller raconte que c’est la transcription d’un rêve fait alors qu’il était au Mexique). La pièce vue par Thalheimer est une hallucination et Debuisson, son héros plus halluciné que les autres, l’alcool aidant.

Naguère Matthias Langhoff avait donné au festival d’Avignon une version de «  La mission  » forte et plurielle où les acteurs (Serge Merlin, François Chattot, Christiane Cohendy, Laurence Calame, etc.) évoluaient sur un sol pentu, jouant avec le déséquilibre, l’ascension ou la chute.

L’obsédante scénographie (signée Olaf Altman) de «  La mission  » dans la mise en scène de Michael Thalheimer organise, elle, un inéluctable mouvement circulaire de battants rappelant ces balanciers que l’on croise dans les exploitations pétrolières. Du sous-sol surgissent des fantômes qui s’avèrent avoir été des hommes. La roue tourne mais l’axe reste le même. «  Pourquoi l’avenir est-il toujours au singulier  » demande Antoine Debuisson à Galloudec. Il y a chez ce personnage à la fois la culpabilité de celui qui survit alors que les autres sont morts au combat et la honte rentrée du repenti qui trahit ses idéaux et ses amis. C’est ce que pressent Debuisson en s’adressant à son autre compagnon de mission  :

«  Tuez-moi avant que je vous trahisse. Je redoute, Sasportas, la honte d’être heureux en ce monde  ».

Quelle pièce  ! Quelle puissance d’écriture  ! Le leitmotiv de «  La mission  » transcrit en lettres capitales dans la version française (traduction Jean Jourdheuil et Heinz Schwarzinger, Editions de Minuit)

«  LA REVOLUTION EST LE MASQUE DE LA MORT / LA MORT EST LE MASQUE DE LA REVOLUTION  »

pourrait tenir lieu d’exergue au spectacle de Judith Depaule «  Les enfants de la terreur  ».

Sont réunis sur scène six militants. Deux Japonais de l’Armée rouge japonaise, deux membres des Brigades rouges italiennes, et deux membres fondateurs de la RAF.

Andréas Baader, «  suicidé  » d’une balle dans la tête en 1977
Ulrike Meinhof, retrouvée étrangement «  pendue  » dans sa cellule à la prison de Stamheim
Mara Cagol, première brigadiste à être tuée en 1975 par les carabiniers
Renato Curcio, libéré en 1998, jamais repenti, fondateur d’une coopérative éditoriale
Fusako Shigenobu, qui purge sa longue peine dans une prison de près de Tokyo
Kozo Okamoto, qui vit à Beyrouth et dont les années de détention ont ébranlé la raison.
« …vaguement entendu parler de Baader »

Tous sont nés dans les années 1940 (sauf Meinhof, née en 1934, rajeunie par l’impressionnante actrice qui l’interprète, Anne-Sophie Sterck). Tous se sont battus contre le capitalisme, une société fondée sur des inégalités, un lourd passé fasciste. Tous ont basculé dans la lutte armée et la clandestinité. Le spectacle s’attarde sur l’année 1972 particulièrement meurtrière. A l’exception de Meinhof, les acteurs ont l« âge qu’avait leur personnage dans ces années -là  : la trentaine (Baptiste Amann, David Botbol, Marie Félix, Jonathan Heckel, Judith Morisseau, Cécile Fradet).

Comme aujourd’hui les chaînes d’information continue se complaisent à rendre compte des luttes en insistant sur leurs débordements, l’imagerie lié à ces mouvements révolutionnaires s’en tient généralement aux exploits les plus meurtriers. En interrogeant la gestation de ces années de forte contestation de l’ordre établi, Judith Depaule remonte aux sources à travers des prises de paroles, des témoignages. Elle montre des engrenages, des solidarités, des déterminations sans faille, mais aussi des dissensions, des impasses. Et pour finir, le basculement dans la violence, l’horreur des attentats.

A l’évidence son spectacle s’adresse d’abord aux générations plus jeunes qu’elle qui n’ont pas la mémoire de ces mouvements, et qui, aujourd’hui, sont ceux qui participent ou pas aux coordinations dans les universités, luttent ou pas ou sympathisent avec les sans-papiers, les émigrés, déboulent ou pas à Sivens, etc. (elle-même est une militante très active dans le conflit des Intermittents du spectacle). Mon voisin (la vingtaine) applaudissait à tout rompre à la fin du spectacle. Que savait-il de ces mouvements révolutionnaires  ? “ J’avais vaguement entendu parler de Baader ”.

D’où, dans cette adresse, un vocabulaire scénique qui soit parlant. Il va de la reconstitution d’un attentat à partir d’un jeu vidéo (Call of Duty) à un ironique et très réussi faux JT de l’époque, d’un mur lumineux en mouvement à des costumes volontairement datés en passant par des maquettes où à l’aide de bouts de ficelles et d’allumettes sont reconstitués, des incendies “ révolutionnaires ” (on pense aux allumettes enflammées de “ La chinoise ” de Godard).

Le spectacle “ Les enfants de la terreur ” est constamment accompagné par une musique (Eryck Abecassis) rendant hommage au rock de l’époque et aux chants révolutionnaires, musique et chants portés et magnifiés par l’interprétation qu’en donne la chanteuse et guitariste Mélanie Frisoli.

Dans le hall du théâtre (le spectacle a été créé dans la salle D-G Gabily à Rennes, dans le cadre du festival Mettre en scène), outre leur billet, les spectateurs pouvaient prendre la copie d’une lettre ouverte à la mère de Rémi Fraisse écrite par Farid El Yamni, frère de Wissam “ assassiné par la police le Ier janvier 2012 ” à Clermont-Ferrand. On y lit ceci  :

“ Comprenez que l’on ne peut concevoir la non-violence qu’à condition de supposer que le camp d’en face est capable de se remettre en cause  : ils en sont humainement incapables parce qu’ils considèrent que remettre en cause la police, cela serait remettre en cause l’Etat. Depuis 40 ans on assiste à la même démarche pour noyer les meurtres de l’Etat malgré les vidéos, les témoins, les évidences. Depuis 40 ans il y a des sit-in, des manifestations, des livres, des prises de positions d’hommes politiques, des tribunes adressées au ministre de l’intérieur. Depuis 40 ans cela ne fonctionne pas. ”

 

INFOS PRATIQUES
« Les enfants de la terreur » par Judith Depaule, « La mission d’Heiner Müller par Michael Thalheimer
deux spectacles autour de la révolution et des mouvements révolutionnaires
«  Les enfants de la terreur  », après Mettre en scène à Rennes, le spectacle est à l »affiche du festival du Val d »Oise  : le 14 nov à 20h30 au théâtre de Goussainville, le 21 nov, 20h30 au Théâtre d »Argenteuil et le 27 nov à 19h30 à la Scène nationale de Cergy-Pontoise
«  La mission  », Théâtre de la Colline, mar au sam 20h30 (sf 25 nov à 19h30), dim 15h30. Jusqu »au 30 nov.

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Les trois coups / Jean-François Picaut / "Idée, idéal, idéologie, dérives ?" / 13.11.2014

Idée, idéal, idéologie, dérives ?

Judith Depaule est une spécialiste du théâtre politique. La création qu’elle effectue dans le cadre de Mettre en scène se situe, comme une grande partie de son travail, à l’intersection du documentaire et du spectacle multimédia. Un alliage particulièrement réussi dans son dernier ouvrage.

Théâtre et politique, voilà une question bien connue de Judith Depaule, elle qui a soutenu une thèse sur le théâtre dans les camps staliniens. Son nouvel opus, les Enfants de la terreur, se situe au cœur brûlant de cette problématique.

Le centre névralgique de l’histoire, c’est l’année 1972 qui vit les Japonais du Nihon Sekigun (l’armée Rouge japonaise) signer un attentat sur l’aéroport de Tel-Aviv, la prise d’otages aux J.O. de Munich réalisée par Septembre noir, tandis que la Fraction armée rouge (Rote Armee Fraktion) commettait cinq attentats meurtriers et que les Brigades rouges italiennes commençaient leurs actions violentes.

Le récit proprement dit débute avec la prise d’otages de Munich. Des comédiens la rejouent sur scène : les Palestiniens du commando sont interprétés par des femmes. Des projections vidéo donnent à voir quelques extraits d’actualité, un journal télévisé fictif, des opérations reconstituées en vidéo, tandis que trois musiciens placés côté cour interprètent en direct une musique rock. Nous avons là, sur un plateau complètement ouvert et nu, tout le dispositif scénique utilisé pendant la répétition. Il suffit d’y ajouter, côté jardin, de grands caissons mobiles en bois, et qui figureront divers éléments du décor. Ils permettront aussi les changements de costumes à vue.

La belle trouvaille de Judith Depaule, c’est d’avoir resserré le débat autour des évènements de 1972 et de l’avoir incarné dans trois couples dont chacun est emblématique d’une des trois principales organisations qu’il a choisi de suivre. Ulrike Meinhof et Andreas Baader représentent la R.A.F., Fusako Shigenobu, la « Reine rouge » ou la « Veuve noire », et Kozo Okamoto, l’armée Rouge japonaise. Enfin, les Brigades rouges italiennes s’expriment par la bouche de Margherita Cagol, dite Mara, et de son mari, Renato Curcio. Tous les trois sont des dirigeants et/ou des fondateurs de leur mouvement. Il faut y ajouter le personnage épisodique de Mei Shigenobu, la fille que Fusako Shigenobu a eue d’un responsable palestinien du Front populaire de libération de la Palestine, l’organisation de Georges Habache et Ahmed Jibril.

Le récit que chacun fait du parcours qui l’a conduit à son engagement, en ancrant les personnages dans l’humanité, joue un peu le rôle de la captatio benevolentiae dans la rhétorique antique. Il suscite sinon la sympathie, du moins l’empathie à leur égard. Chacun peut se reconnaître dans ces jeunes gens qui deviendront des terroristes. Ce sont tous des intellectuels à l’exception de Baader et Kozo Okamoto. Ulrike Meinhof est même une journaliste reconnue avant sa radicalisation. À cet égard, le couple italien est le plus représentatif. Ils se marient à l’église et plus tard, quand ils sont déjà passés à l’action violente, rêvent d’avoir un enfant. Mara nous fait alors part de leur réflexion sur ce que peuvent être les devoirs de parents révolutionnaires.

Un « agréable déplaisir »

Une fois cette humanisation accomplie et les préjugés défavorables des spectateurs assoupis ou anesthésiés, Judith Depaule peut les inviter à suivre le chemin parcouru par ces hommes et ces femmes de l’idée à l’idéal puis à l’idéologie, jusqu’à la radicalisation finale. Et c’est là qu’apparaît toute la pertinence du choix effectué en faveur du multimédia. La présence constante en scène et parfois en plein cœur du plateau d’une musique dont l’univers de référence est le rock alternatif, la projection d’images d’actualité ou leur reconstitution vidéo, la retransmission vidéo sur écran de certains attentats réalisés, sous nos yeux, sur des maquettes, tout cet ensemble contribue à créer chez lui cet état « d’agréable déplaisir » dont parle l’auteur.

Tout au long de la pièce, le spectateur est interpellé, convié non seulement à comprendre, ce qui est essentiel, mais à prendre position. Le jeu des acteurs y est pour beaucoup, et il n’y a pas de maillon faible dans la troupe. Qu’il me soit cependant permis de louer plus spécifiquement les interprètes de Meinhof et Cagol. Elles savent rendre toute l’humanité de leur personnage sans occulter leur dérive idéologique qui n’en paraît que plus implacable.

Qu’on ne s’imagine pas qu’il ne s’agit là que de théâtre historique. À chaque pas, Judith Depaule, sans le dire ouvertement ni le sous-entendre plus ou moins élégamment, nous conduit à nous interroger sur notre temps. L’attentat dont est victime Rudi Dutschke, le 11 avril 1968, véritable catalyseur pour la jeunesse contestataire allemande, n’est pas sans rappeler une mort récente. Ces militants, que nous jugeons perdus et qui acceptent de perdre leur vie pour faire avancer une cause qu’ils estiment juste, n’appartiennent qu’au passé ? La société bloquée des années soixante où les jeunes ont l’impression d’étouffer, la surdité des autorités et leur faillite morale, etc., tout cela ne vous évoque rien ?

Je vois dans les Enfants de la terreur de Judith Depaule une œuvre pleinement théâtrale et politique. J’exprimerai un regret cependant : que l’auteur ait exclu la France de son propos. Les discussions au sein de la Gauche prolétarienne, qui aboutissent à d’autres choix, auraient enrichi le point de vue. Action directe, bien que sa création soit plus tardive, aurait fourni un pendant français aux groupes retenus. Toutefois, si, dans tous les domaines de la culture, tous les artistes empoignaient notre époque avec autant d’acuité et de pertinence, nous aurions accompli un grand pas.

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Syndicat National des Enseignements de Second degré / Micheline Rousselet / ""Les enfants de la terreur"" / 01.12.2014

"Les enfants de la terreur"

Ils ont, à la fin des années 1960, choisi la lutte armée et ont eu pour nom Fraction Armée Rouge en Allemagne, Brigades Rouges en Italie et Armée Rouge Japonaise. Ce sont les actions des leaders de ces mouvements, qui ont choisi de rompre avec le passé marqué par le fascisme de leur pays pour se lancer dans des actions terroristes, que Judith Depaule met en scène. Certains étaient fils de bourgeois, d’autres issus du prolétariat, l’un était, à l’origine, un fêtard amateur de grosses cylindrées, d’autres des révoltés. Mais tous se sont rangés au côté des Palestiniens dans leur lutte contre la politique israélienne, au côté des Vietnamiens dans la lutte contre l’impérialisme américain et au côté des prolétaires en lutte contre le capitalisme. Ils ont pensé que la lutte armée était la seule voie vers la lutte des classes et que plus elle était violente, plus elle était révolutionnaire.

C’est sur la prise d’otages aux Jeux de Munich en 1972, détonateur du passage à l’acte des trois organisations, que démarre le spectacle qui sera centré sur cette année. Les séquences où les six protagonistes parlent de leur parcours, de leur engagement, de leurs idées sur la famille ou la condition féminine, alternent avec des séquences plus chorégraphiées où les acteurs face aux spectateurs évoquent en paroles ou en musique l’action révolutionnaire et les attentats. Mais on peut regretter dans ces séquences la place excessive accordée aux textes de pure propagande, aux tracts, alors que les débats sur le fond sont totalement évacués. On sent bien que Judith Depaule, qui dans toutes ses productions fait un théâtre politique, s’est bien documentée. Mais on a l’impression, ici, qu’elle s’est laissée entraîner dans une sorte de romantisme de l’engagement révolutionnaire où l’on exalte le fait de donner sa vie pour une cause, où la violence apparaît juste, comparée à celle que fait subir la justice aux militants arrêtés, et où les victimes sont ravalées au rang de dégât collatéral sur lequel on ne s’interroge jamais.

En dépit de ces réserves, il faut saluer le travail de scène qui est magistral. L’utilisation du jeu frontal, de la musique et de la vidéo, devenus des must du nouveau théâtre, est ici particulièrement pertinente et réussie. Les acteurs racontent leur parcours à la salle, leurs déplacements sont chorégraphiés et font parfois écho aux vidéo, telle la gymnaste faisant le geste de lancer des pierres sur fond de manifestation. La musique de « rock expérimental », composée pour le spectacle et interprétée par deux musiciens, auxquels se joignent les comédiens qui chantent et jouent de la guitare et de la basse, se superpose à des chants révolutionnaires. En fond de scène, un mur lumineux composé de boîtes de leds, connecté aux autres médias, musique et son, vibre et change de couleur passant d’un rouge violent à un blanc aveuglant. Sur ce mur passent des images d’archives plus ou moins nettes, à l’image de nos souvenirs qui s’estompent. La représentation des attentats utilise des moyens divers : reconstitution pure et simple, maquettes de villes lumineuses où les bâtiments s’enflamment et explosent pour les attentats de la Fraction Armée Rouge, jeu vidéo interactif joué en direct par les comédiens pour l’attentat de l’aéroport de Lod à Tel-Aviv. La musique et la lumière créent une atmosphère de violence parfois à la limite de l’inconfortable.

On sort de la salle secoué, emportant des images fortes, comme celle de la gymnaste au justaucorps rouge qui continue à tournoyer au milieu des corps des otages abattus à Munich, ou l’évocation de l’emprisonnement des membres de la RAF dans des cellules minuscules, soumis à une privation sensorielle qui les détruit. C’est un spectacle qui ne laisse pas indifférent et en dépit de réserves sur le fond, il faut saluer le travail de Julie Depaule et de ses six jeunes interprètes acteurs, performeurs, et musiciens.

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Le Terrasse / Gw. D. / "Les enfants de la terreur" / 17.04.2015

Les enfants de la terreur

La metteuse en scène Judith Depaule questionne la violence terroriste des années 70 dans un spectacle multimédia.

« Changer le monde, le rendre meilleur, faire justice, mais comment et à quel prix ? ». La question trottine dans les maquis de l’Histoire depuis longtemps… La metteuse en scène Judith Depaule la réactive aujourd’hui en revisitant les mouvements contestataires des années 70, pour interpeller notre présent dilué dans la crise et l’« aquoibonisme » ambiant. « Née trop tard pour avoir vécu cette période révolutionnaire, mais trop tôt pour m’en défaire, j’héberge, à mon corps défendant, l’héritage d’une utopie révolue qui oscille entre fascination et rejet et me pose la question critique de mon propre engagement. » dit-elle. A travers le parcours de six militants, elle suit la piste de ceux qui, dans le sillage de 1968, choisirent la lutte armée au sein de la Fraction Armée Rouge (RAF), des Brigades Rouges et de l’Armée Rouge Japonaise. En scène, les comédiens portent témoignages, manifestes contestataires et textes de propagande, sur fond de musique rock expérimentale et de projections d’images d’actualité ou de reconstitution : une plongée au cœur de ces années-là !

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Poly / Emmanuel Dosda et Thomas Flagel / "Jeu de maux" / 06.05.2015

Jeu de maux

Musique Action, festival organisé par le CCAM de Vandœuvre-lès-Nancy, continue ses aventures soniques où les mots ont la parole, s’emparant à bras le corps des turbulences que traverse notre époque.

Musique électroacoustique, art sonore interactif, free-rock, impro. Explorations sonores sous forme de spectacles transgenres, de créations originales aventureuses, de rencontres transdisciplinaires ou de machines musicales. Musique Action est ponctué de rendez-vous, d’open workshops, de propositions plastiques et de micros-actions. Des sons, des gestes et beaucoup de mots, autant d’actes de résistance à l’obscurantisme ambiant. Dominique Répécaud est le directeur d’un festival se positionnant comme « une saine et nécessaire réaction à la pesanteur contemporaine ». Et d’appuyer : « Notre société dans ses différents étages connaît des difficultés actuellement : crises politique et économique, interrogations d’ordre identitaire… Dans ce contexte, la vie artistique, notamment dans ses dimensions les plus expérimentales, finit par être considérée comme accessoire par les politiques et une partie du public qui se réfugie dans des valeurs “sûres”. J’observe depuis une trentaine d’années que les artistes défendus par Musique Action maintiennent un très haut niveau d’investissement et de recherche qui se traduit par une grande qualité d’interprétation, dans un rapport privilégié avec le public. Ils proposent l’antidote à la déprime qui nous gagne ! » Mieux, le festival met le doigt où ça fait mal, considérant « l’art comme une articulation » (entre différentes composantes d’un groupe, de cultures…) permettant d’évoquer des sujets difficiles, via le filtre musical et les mots : le texte, le témoignage, les lettres, sont particulièrement présents dans cette édition.

Domina-sons

La Voix de son maître est un projet signé par la metteuse en scène Perrine Maurin et l’électroacousticienne Carole Rieussec, habituée de la manifestation. Dans une démarche proche de la sociologie, elles ont recueilli des paroles dans un micro-trottoir, à propos de la domination : argent, travail, sexe… Durant la diffusion, le public est invité à s’allonger sous un plafond de haut-parleurs formant un acousmonium crachant les témoignages portant sur la notion de pouvoir. Les auditeurs profitent de la « profondeur de champs sonores » et s’imprègnent des sons qui se meuvent, tels des vagues. « C’est un peu comme si nous écoutions simultanément une quinzaine d’émissions de radio, en ayant la capacité de fixer son attention sur telle ou telle information, », explique Dominique Répécaud au sujet d’une proposition de « poésie sonore à caractère documentaire ». Autre temps fort avec Les Enfants de la terreur de Judith Depaule qui revient sur les années 1970, une période artistique intense – avec des gens comme Zappa, Beefheart ou Soft Machine « qui ont permis d’asseoir de grands mouvements musicaux » – et troublante d’un point de vue politique. Le spectacle évoque le parcours d’utopistes / terroristes, des membres de l’Armée Rouge japonaise, des Brigades Rouges italiennes et de la Fraction Armée Rouge allemande. Une véritable explosion écarlate de textes (contestataires, de propagande…) et de musiques expérimentales. Révolutionnaire.

Songes post-exotiques

Nouvel objet hybride avec la Compagnie Roland furieux, emmenée par la comédienne et metteuse en scène Laëtitia Pitz et le compositeur et clarinettiste Xavier Charles, qui crée pour le festival la première partie de Mevlido appelle Mevlido : un spectacle entre théâtre musical et « pièce pour les oreilles » inspirée d’un roman d’Antoine Volodine. Le duo, habité par « l’écriture de l’image développant tout un imaginaire » de l’auteur nous emporte dans un univers lunaire : devant un écran panoramique, une superposition de tulles et de pendrillons qui s’ouvrent et se ferment forment un écrin où se succèdent des ambiances de brouillard, de fumée, de buée. Gouffre, crépuscule naissant, ciel s’embrasant créent les conditions propices à l’enclenchement d’une longue rêverie où se mêlent souffle des mots et chants, refrains, spirales et récurrences en écho dans un mélange de voix et sons préenregistrés et scandés en live, de musique électroacoustique et de bruitages envoûtants. Utilisant la répétition à la manière des chamanes, la poésie rythmique de Volodine est entièrement au service de la création d’images oniriques, de rêves éveillés au milieu de l’obscurité du réel. Nous cheminons sur les traces de Mevlido, policier chargé d’espionner des révolutionnaires alors même qu’il sympathise avec leur lutte, hanté qu’il est par la mort de sa femme, torturée vingt ans auparavant par des enfants soldats. « Sa recherche personnelle d’une mémoire archaïque, de moments heureux passés avec sa première femme, sont une quête poétique de l’autre passant par la construction d’une communauté qui résonne avec l’état actuel de notre monde et de ce à quoi nous faisons tous face… » assure Laëtitia Pitz. Il en va de Mevlido comme de Musique Action, même si le festival sait également aller dans l’« action pure » en proposant des moments libératoires, comme le concert du guitariste Marc Ribot, permettant de « relâcher certaines tensions ».

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Est Magazine / / "Les enfants de la terreur" / 09.05.2015

Les enfants de la terreur

« Les enfants de la terreur » est une proposition de Judith Depaule programmée dans le cadre du festival Musique Action. La metteuse en scène française s’intéresse au choix de la lutte armée que firent, au début des années 1970, plusieurs organisations d’extrême gauche. Elle s’attache plus particulièrement aux parcours d’anciens militants de l’Armée Rouge japonaise, des Brigades Rouges italiennes et de la Fraction Armée Rouge allemande.

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Revue d'Histoire du Théâtre / Thomas Cepitelli / "Envisager le théâtre comme un acte révolutionnaire, entretien avec Judith Depaule" / 16.07.2015

Envisager le théâtre comme un acte révolutionnaire, entretien avec Judith Depaule

De spectacle en spectacle Judith Depaule, metteure en scène et auteure, creuse le sillon d’une oeuvre qui, par un entrelacs de signifiants scéniques (vidéos, animations d’images, mixage en direct, musique live) et d’une recherche documentaire étoffée aux sources variées, interroge les liens entre théâtre, politique et engagement.

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Le bien public / Mayalen Gauthier / "Rouge sang" / 07.04.2016

Rouge sang

Les Enfants de la terreur, réaliste, violent, politique.

Foisonnante, ultracréative, la pièce de Judith Depaule, Les Enfants de la terreur, ferre efficacement son public. Grâce à des vidéos d’époque ou reconstituées, des musiciens qui jouent du rock en live, la metteure en scène nous présente trois couples d’organisations révolutionnaires majeures d’après 1968 : la R.A.F. (Fraction armée rouge allemande), l’Armée Rouge japonaise et les Brigades rouges italiennes. Individuellement, les comédiens racontent leur parcours de vie et ce qui les a menés à devenir terroristes. La moitié n’a jamais eu 40 ans. La pièce est très (trop ?) dense d’informations, mais le spectateur suit, captivé, ces destins terrifiants dans les flots de l’extrême gauche. Une question reste ouverte : « les terroristes sont-ils des héros qui sacrifient leurs vies ou des barbares qui sacrifient celles des autres ? « 

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