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La guerre de mon père – Articles de presse
l'École des lettres / Tramor Quemeneur / "La guerre d’Algérie au théâtre" / 03.03.2016La guerre d’Algérie au théâtre
À la fin de l’année 2015 et au début de l’année 2016, deux créations théâtrales ayant pour thème la guerre d’Algérie, et plus exactement la mémoire de cette guerre, ont été montées dans la région parisienne : Revenir ! Quand parlent les cendres, mise en scène par Barbara Bouley-Franchitti, et La Guerre de mon père, mise en scène par Judith Depaule
Présentation de ces deux œuvres appelées à tourner.
« Revenir ! Quand parlent les cendres »
Revenir ! Quand parlent les cendres, a été créée et mise en scène par Barbara Bouley-Franchitti de la compagnie Un Excursus. Elle a été jouée en novembre 2015 et en février de cette année à Anis gras – Le lieu de l’Autre à Arcueil. Il s’agit plus particulièrement du premier volet d’un triptyque consacré au post traumatic stress disorder (PTSD), dû à des chocs émotionnels violents, notamment lors de conflits armés.
C’est d’ailleurs là que la pièce nous amène, pour nous raconter les souffrances du père de la protagoniste après être revenu de la guerre d’Algérie. La pièce consiste en un dialogue du personnage avec l’urne funéraire de son père dont les funérailles viennent d’avoir lieu.
La mise en scène est dépouillée : des bougies sont disposées à endroits réguliers sur la scène, avec quelques autres éléments (l’urne funéraire en forme d’œuf, un tabouret, une mini-chaîne…). Cette pièce, que l’on devine largement autobiographique, raconte les silences, les cauchemars et les crises que le père a faits subir à son épouse et à sa fille au retour de la guerre.
Les silences et les traumatismes sont en effet une expérience largement partagée par les enfants de soldats de la guerre d’Algérie. C’est ainsi une occasion de s’interroger sur la transmission du traumatisme à la génération suivante.
« La Guerre de mon père »
La seconde pièce, La Guerre de mon père, développe un thème très proche. Elle est portée sur scène par Judith Depaule de la compagnie Mabel Octobre. Ici aussi, un seul acteur est sur scène. L’une des différences avec la première pièce est l’âge des protagonistes : dans Revenir !, la protagoniste, plus âgée, a vécu le retour de son père de la guerre et l’a maintenant enterré, tandis que dans La Guerre de mon père, celui-ci est encore en vie et apparaît en vidéo sur scène.
Dans cette pièce aussi, l’acteur s’interroge sur les silences de son père à propos de sa participation à la guerre d’Algérie. La mise en scène utilise ici beaucoup les nouvelles technologies : le père intervient par l’intermédiaire d’une vidéo, l’acteur est en conversation vidéophonique avec des amies (une française et une d’origine algérienne) qu’il interroge à propos du parcours de leurs parents dans cette guerre.
L’acteur reprend ensuite le parcours des appelés du contingent dans la guerre d’Algérie, d’une manière très didactique et très interactive : la mise en scène joue en effet sur la vidéo et la musique, l’acteur déploie une carte de l’Algérie projetée en même temps sur écran, et il dispose sur cette carte des « petits soldats » en plastique pour illustrer le quadrillage du territoire opéré par l’armée française…
La compagnie théâtrale a également réalisé des entretiens filmés avec une quinzaine d’anciens appelés, qui viennent appuyer le propos développé. Cela permet ainsi de suivre le parcours de ces anciens appelés, les rôles qu’ils ont joués au cours de cette guerre, leurs peurs, leurs rapports à la violence, toujours dans un aller-retour entre scène et vidéo.
Àla fin de la pièce, le parcours de plusieurs familles algériennes offre un contrepoint intéressant, avant de se terminer sur le bilan de cette guerre : « Tout ça pour ça » pour l’un, « Une connerie » pour l’autre. Bref, un beau gâchis que cette guerre, mais une très belle pièce, didactique, qui a commencé à être présentée dans des lycées.
Deux représentations doivent encore être données à Confluences (Paris 20e) les 17 et 18 mars prochains. Espérons qu’elles seront suivies de nombreuses autres !
Tramor Quemeneur
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Émission spéciale semaine anticoloniale et antiraciste
Jeudi 10 mars 2016, Judith Depaule et Vincent Deslandres étaient les invités de l’émission spéciale semaine anticoloniale et antiraciste sur la Radio F.P.P (106.3 FM – www.rfpp.net).
Au programme : le spectacle « La guerre de mon père » et la guerre d’Algérie, le festival d’art militant PÉRIL(S) , la programmation et les actions du lieu d’engagement artistique CONFLUENCES…
Lien vers l'article originalGuerre d'Agérie. Ils témoignent pour une mémoire apaisée
Terrorisme, justice d’exception, Front national, islamophobie… Cinquante-quatre ans après la signature des accords d’Évian, le 19 mars 1956, la guerre d’Algérie et ses stigmates hantent plus que jamais la société française. Des hommes et des femmes rompent le silence, et tentent de lancer des passerelles au-dessus de la Méditerranée, comme autant de points de suture sur la plaie d’un conflit qui n’en finit pas. Parmi eux, Gérard, ancien appelé en Algérie, Tony, ancien réfractaire, et Bernard, pied-noir progressiste, ont accepté de raconter leur histoire à « l’Humanité Dimanche ».
GÉRARD LECHANTRE, APPELÉ EN 1958 Le grand pardon
Le 19 mars 2012, Gérard Lechantre se rend à la célébration du cinquantenaire des accords d’Évian à Nanterre. « Quand j’arrive sur place, je vois des militaires bardés de médailles. J’ai tourné les talons et, sur le trottoir, je me suis mis à chialer tout ce que je pouvais. La cérémonie était à la gloriole de la guerre, loin de toute idée de réconciliation. » À l’opposé des sentiments de cet ancien militant des Jeunesses ouvrières chrétiennes, appelé en 1958 sous les drapeaux pour effectuer son service militaire.
Il a 20 ans. Incorporé dans le bataillon de Corée, Gérard part pour le nord-est de l’Algérie. « Nous étions pour moitié des appelés, pour moitié des engagés arrivant du Vietnam. J’ai passé ma première nuit sous un crâne verni orné d’un collier de dents humaines. Le lendemain midi, dimanche, on nous a servi des oreilles en vinaigrette, trophées de guerre du bataillon. » Ce n’est qu’un avant-goût : Gérard assiste, pendant les opérations, à des viols, des tabassages, des pillages. Puis à la torture. « Une fois, j’ai explosé face à ma hiérarchie. Le gradé m’a répondu : « Tu fermes ta gueule ou tout le village brûle dans cinq minutes. » » Gérard rentre très politisé de son service militaire. Il entre au comité de vigilance contre l’OAS, puis au PSU. « Mais la guerre d’Algérie n’était plus à l’ordre du jour. Je n’en ai plus jamais parlé », explique le militant de toujours : syndicaliste à la CFTC, il s’engage aux côtés de la gauche ouvrière et paysanne, puis fonde une association d’aide aux chômeurs à Nanterre.
LEUR PENSION REVERSÉE
Suite à cela, il rejoint la 4ACG, une association d’anciens appelés qui reversent leur pension d’anciens combattants à des oeuvres sociales algériennes. « Parce que cet argent nous brûle les doigts. »
« Grâce à ces fonds, nous avons acheté 50 vélos pour que les petites filles puissent aller à l’école, des machines à coudre pour des ateliers de couture en Kabylie… » Les anciens appelés se sont également rendus en Algérie afin de fraterniser avec les ex-moudjahidine. À cette occasion, Gérard a rencontré un Algérien dont le père avait été tué par l’armée française en 1958 au Kroubs, au moment où lui-même y était soldat. Cinquante ans plus tard, ils se sont réconciliés autour d’un repas.Retrouvez les témoignages de Gérard Lechantre et d’autres anciens appelés dans le spectacle « la Guerre de mon père », de Judith Depaule et Vincent Deslandre, de la Compagnie Mabel Octobre, le jeudi 17 mars à 20h30 et le vendredi 18 mars à 15 h et 20h30.
BERNARD ZIMMERMANN, PIED-NOIR Le trouble dans la nationalité
«Enfant, lorsqu’on voya ge a it en Algérie, je cherchais le panneau indiquant « Verdun ». Le 13 mai 1958, j’avais 18 ans et j’étais enthousiasmé par le putsch des généraux. Enfin, la guerre allait finir, et nous allions pouvoir vivre en paix avec les Algériens », se souvient Bernard Zimmermann. Le petit pied-noir grandit à Oran et la seule France qu’il connaît, c’est l’Algérie. Son regard change lorsqu’il entre à l’École normale d’Alger. « J’entendais nos camarades de classe dire qu’ils avaient eu « les melons »… Le 13 mai 1959, un camion de l’armée française a essayé de rafler le cuistot de l’école pour le forcer à aller manifester sur le forum d’Alger et faire croire que les Algériens soutenaient les généraux. Ça a été le déclic ». L’année suivante, il échappe au service militaire, car de Gaulle ayant décidé de scolariser tous les enfants algériens, les instituteurs pieds-noirs sont réquisitionnés et envoyés au bled. « En 1962, avec ma femme, nous ne pouvions plus mettre les pieds à Oran ; l’OAS menaçait de mort ceux qui continuaient à faire la classe aux Arabes, contrairement à leurs consignes. » L’été 1962, l’instituteur part en vacances en France et, sous la pression de sa famille inquiète, y reste un an. « L’été suivant, nous n’en pouvions plus. La vie métropolitaine nous semblait très matérialiste. Nous voulions rentrer en Algérie et adopter la nationalité. » Mais, très vite, le clientélisme, la corruption s’installent dans l’administration. « En 1965, Boumediene fait son coup d’État. À Oran et Mostaganem, il y a des descentes dans l’administration pour agresser les femmes qui travaillent et les renvoyer au foyer. C’est ce qui nous a décidés à partir. J’avais réalisé que, sur le plan des valeurs, je me sentais français. »
PIEDS-NOIRS ET OPA DU FN
En 1985, Bernard rejoint l’association Coup de soleil, qui valorise les productions d’artistes originaires du Maghreb. Il fonde ensuite Soleil en Essonne, qui propose des activités culturelles aux résidents du foyer Adoma de Montgeron. Parallèlement, le professeur écrit l’ouvrage « les Résistances piedsnoires à l’OAS » (Éditions l’Harmattan). « Parce que je ne supporte pas qu’on assimile les pieds-noirs à l’OAS. Et encore moins l’OPA menée par le Front national sur cette population. »
« JE NE VEUX PAS LA FAIRE ! » TONY ORENGO, « réfractaire non violent »
Ce dimanche de mars, Tony Orengo est descendu spécialement de son arrièrepays toulonnais pour participer au Salon anticolonial et faire connaître l’expérience des « réfractaires non violents » aux plus jeunes. Qui se douterait que ce papy à l’oeil malicieux a passé sa jeunesse sous les verrous ? Son refus du service militaire, en 1958, lui a pourtant valu cinq ans de captivité.
« Peut-être la vision de femmes tondues et d’hommes que l’on asphyxiait dans les fontaines explique-t-elle ma réticence à toute forme de guerre », analyse le retraité, témoin de la Libération. Son engagement dans le scoutisme protestant, puis à la CIMADE n’y est pas non plus pour rien. « J’avais de longues discussions avec les frères de Taizé, voisins de notre local, très anticolonialistes. Et ma soeur, professeur en Algérie, s’était mariée avec un Algérien », raconte-t-il. Jeune homme, il est déjà conscient de l’inégalité entre Français et Arabes dans la colonie, de l’existence de la torture… « J’allais aux convocations de l’armée, mais je leur disais que je refusais de faire mon service. De là, je n’ai plus retrouvé la liberté », raconte Tony. Jugé par les tribunaux militaires, il passe un an à la prison de Metz, deux à celle de Liancourt, dans l’Oise. « Mais je ne m’ennuyais pas trop : je donnais des cours d’alphabétisation aux prisonniers maghrébins. » Le jeune homme est libéré le 17 janvier 1963. « Autour, le monde avait changé. J’ai éprouvé le besoin de rentrer dans la vie « normale », et j’ai trouvé un boulot chez un des seuls patrons communistes de Marseille. »
TOUJOURS EN RÉSISTANCE
Pourtant, dix ans plus tard, le naturel revient au galop. Tony adhère en pagaille au Mouvement de la paix, à celui contre l’armement atomique, à la Ligue des droits de l’homme. À 60 ans, il était même sur une des flottilles partie pour Gaza pour briser le blocus israélien. Puis, en 2003, il reçoit l’appel d’un objecteur de conscience à la recherche de ses anciens frères de combat. « En 1963, ils s’étaient donné rendez-vous en l’an 2000 sur le causse du Larzac, mais un seul s’en souvenait ! » rigole Tony. Les papys finissent par se retrouver et s’aperçoivent qu’ils ont très peu partagé leur expérience avec leurs enfants et petits-enfants. « Alors nous avons créé l’association des réfractaires non violents à la guerre d’Algérie, publié un livre, fait un DVD sur notre histoire, on témoigne dans des écoles… et on a même mené des actions vers les refuznik israéliens ! »
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