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- Corps de femme 1 – le marteau
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- Corps de femme – variation #2
- Corps de femme 3 – les haltères
- Ce que j’ai vu et appris au Goulag
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- Vous en rêvez (Youri l’a fait)
- Qui a tué Ibrahim Akef ?
- Qui ne travaille pas ne mange pas
Desesperanto – Articles de presse
critique d’art / Ramon tio Bellido / "ClIquEquEtI/ClIquEquEta" / Décembre 2002ClIquEquEtI/ClIquEquEta
Je suis allé voir « Desesperanto » à Public le vendredi 21 décembre 2002, avant de partir en vacances. J’avais vaguement fait mes valises mais j’avais pris la peine de bien ranger mon portable dans sa petite mallette capitonnée et protectrice, car, c’est de notoriété publique, on ne rigole pas avec les ordinateurs. On rigole tellement moins que dans le champ de l’art et de l’expression artistique, cet outil / appareil s’est transformé en une espèce de référence à tout faire, ou plutôt à « tout est plus ou moins fait et donné », et donc y’a qu’à s’abîmer dans la techno informatique offerte et appuyer sur le clavier cliquetant pour croire que ça roule tout seul et que, technologiquement en soi, ça fabrique un langage, et pas n’importe lequel s’il vous plaît, mais un machin éminemment artistique. Ce coup là, pour ceux qui ont l’âge vénérable de mes artères (peu ou prou le demi-siècle) on nous l’a déjà fait à deux reprises, proches d’ailleurs de la fin des avant-gardes artistiques et de l’impasse moderniste des mêmes. D’abord avec le coup de la photo, qui de document plutôt périphérique a gagné ses galons d’œuvre à part entière (sauf qu’elle a choisi de perdre au change son pouvoir de reproductibilité non-stop, plus-value commerciale aidant) et puis avec la vidéo, qui a choisi de ne plus être que l’enfant de la télé et est devenu itou une catégorie à part entière, même si elle se mélange allégrement aujourd’hui avec le cinoche d’antan, les salles obscures et les temps de projection…
« Desesperanto » donc, le titre l’annonce, ça cause de cette utopie d’un langage communicationnel intelligible par tous et en tous lieux, mais qui serait confronté à un mur ou un seuil exaspérant, celui de croire justement, ou de faire croire plus précisément, qu’un tel bastringue est non seulement, possible, mais nécessaire. C’est pas moi qui le dit, c’est à nouveau l’ordi et la main-mise relativement impérialiste d’internet. Vous affolez pas, branchez vous et ça roule tout seul. Oui, mais quoi ? Les inepties que nous trimbalent les serveurs d’on ne sait quels pouvoirs plus ou moins occultes, les sueurs froides d’y accéder ou de s’y affoler dans des bugs insensés, la soi-disant solvabilité d’un langage codifié que tout le monde comprend illico, sinon t’es vraiment un « con » comme le disent sans ambages les manuels pour novices ou retardés (il s’agit de fait des mêmes, et les seconds sont bien sur plus nombreux que les premiers, question de génération my dear, etc…).
En avant l’apologie, ou alors faut un peu démonter la machine, prendre sur soi de la déconstruire, d’en dire et d’en montrer les arrêts sur image, les tressautements, les dysfonctionnements, pour qu’au bout du compte ça (re)devienne tout simplement humain, ça raconte que pour s’en servir et pour lui faire dire quelque chose, elle n’est pas plus seule que nous ne le sommes, mais que c’est à deux ou trois que se joue la partie, la vraie, de la communication. Du vécu restitué, en quelque sorte, sursignalé dans ses banalités communes et communautaires, tel que l’a toujours rejoué le meilleur art dans notre chère histoire artistique à nous, pour autant qu’on nous prouve qu’il y en a une autre qui réponde au doux terme de.
Voilà à quoi s’attellent les trois complices on stage, ça déverse plusieurs sortes et types d’images, du biniou à l’écran, ça se relie dans une rythmique plus ou moins saccadée, scandée, de la console vidéo au saxo en passant par l’oral (de passage). Et au bout du tout, ça fonctionne diablement plutôt bien, ça nous dit sans ambages qu’on est plutôt couillons que cons à s’inquiéter des bugs, des plugs et autres in&out-puts, qu’on est plutôt fainéants de croire que de Vladivostok à Guadalajara, et retour, tout le monde il comprend les images universelles qu’il ingère, même s’il gèle plutôt là-bas et qu’il tropicalise ailleurs, etc…
« Desesperanto », c’est un assez bon moment de déconstruction critique, si je peux me permettre cette évaluation, à un iota sans surprise prés : c’est un peu « moderne » comme proposition et c’est fort heureusement le lot de toute analyse de fond qui s’autointerroge à ses débuts. Déconstruire pour mieux signaler les perfidies de la machine et ses dogmatismes originels, c’est quelque chose d’assez commun à tous les mouvements d’avant-gardes opus cités, c’est une espèce de mal nécessaire et le seul qui s’attaque de front réellement à un morceau qui n’est jamais autant de choix qu’on ne le laisse croire. A se contenter de suivre le diktat de la technologie matricielle, comme un pis-aller insurpassable, on n’invente rien et surtout on fabrique de l’académie à tire-larigot – et ça vient plutôt vite, et d’autant plus vite que la vitesse d’exécution augmente ses capacités reproductrices.
A choisir de se le coltiner et d’y tordre le cou à coups de détails, c’est évidemment ne pas s’aligner dans le goût du non-risque et celui de l’illustration. Au change, on perçoit mieux les turpitudes et les limites de l’objet en question, même si, à force de le déconstruire, on s’en éloigne chaque jour davantage pour préférer s’exprimer « librement », en passant outre ses normes et ses modes, mais tout contre cependant, puisqu’on en dévie alors la fonction en la faisant turbiner au plus juste. Bingo, du paradoxe, et que ça dure…